Le point sur les conservateurs: les antimicrobiens
Définition : Un
conservateur est une substance capable d’empêcher l’altération chimique ou
microbiologique d’un produit.
On
classe parmi ce qu’on appelle conservateur deux classes de produits :
- Ceux
qui vont avoir un effet sur l’oxydation due à l’oxygène, ce sont les
antioxydants
- Ceux
qui vont avoir un effet sur la prolifération bactérienne et fongique
(champignons) : ce sont les conservateurs antimicrobiens.
En
réalité, il serait plus juste de parler de conservateur uniquement pour ceux à
l’action antimicrobienne. Ce post traite seulement des conservateurs
antimicrobiens, un autre sera consacré aux antioxydants.
Sauf
apparence ou odeur suspecte, on ne voit pas ces altérations à l’œil nu, il faut
donc prévenir plutôt que de prendre le risque que notre préparation soit
bourrée de microbes, champignons et autres bactéries : un, on passe du
temps à élaborer une préparation pleine d’agents actifs et d’huiles précieuses,
ce serait dommage que tous ces produits soient altérés et rendent nos crèmes
inefficaces ; deux, la contamination peut être dangereuse pour la peau
comme pour le corps, d’autant qu’on ingère un peu sans s’en rendre compte les
crèmes qu’on se tartouille sur le visage.
Avant
d’entamer notre petite analyse, dois-je rappeler les BPF (ie les Bonnes
Pratiques de Fabrication) ? Il ne sert en effet à rien d’ajouter toute
sorte de conservateur et antioxydant à nos préparations si celles-ci ne sont
pas fabriquées dans des conditions optimales, à commencer par la stérilisation
de tout notre matériel…
A savoir
- Il
existe des éléments nutritifs pour les bactéries. Leur présence dans nos
produits nous rendra donc particulièrement vigilantes : vitamines,
protéines, sucres par exemple
- Un
produit qui ne contient pas d’eau (anhydre) sera moins sujet au développement
des bactéries, qui se développent de façon préférentielle en milieu aqueux.
Les conservateurs antimicrobiens
Les parabens (Methylparaben, Propylparaben, Ethylparaben, Butylparaben)
Il
existe un certain nombre d’idées sur les parabens, mais peu de données
scientifiques accompagnent les allégations que l’on porte sur ces produits. J’ai
étudié le dernier article de l’équipe de El hussein et ses collaborateurs
(2007) sur l’évaluation des parabens utilisés en cosmétique sur l’épiderme
humain. Les résultats sont sans ambiguité : les molécules chimiques, à
utilisation prolongée, s’accumulent dans la peau, avant d’être transportés par
le sang et s’installer dans les tissus humains. Ces éléments sont en faveur
d’une toxicité chronique, puisque 90% des produits cosmétiques de consommation
courante contiennent des parabens, et que le consommateur les utilise
quotidiennement. La toxicité des parabens a été démontrée par plusieurs équipes
scientifiques (Mathews et col., 1956 ; Routledge et col., 1998 ;
Darbre, 2004).
De
quelle façon les parabens sont-ils toxiques ?
En gros, la
peau contient des enzymes qui sont capables de transformer une molécule
chimique absorbée pour la rendre soluble dans l’eau, et ainsi l’éliminer plus
facilement à travers la bile ou l’urine. Or, ce mécanisme ne fonctionne pas toujours
avec les parabens, qui subsistent à l’intérieur des tissus humains, ne sont pas
dégradés et contribuent de ce fait à une toxicité chronique.
Les
parabens sont « oestrogènes-like », c'est-à-dire qu’ils imitent
l’action des oestrogènes et augmentent ainsi la prolifération des cellules
cancéreuses (Andersen et col, 2000-2001). Ils pourraient influencer le
développement des cancers du sein. Chez l’homme, l’application prolongée des
parabens entraînerait une baisse de la sécrétion de la testostérone.
Le Formaldéhyde
Sa
réputation n’est plus à faire. Le Centre International de Recherche sur le
Cancer (CIRC) l’a classé comme cancérogène pour l’homme, je pense que ça se
passe de commentaire…Parmi les effets toxiques de ce produits :
irritations sévères de la peau et des yeux, cancers nasopharyngés, allergies
cutanées, effets neurotoxiques, possible risque d’augmentation des leucémies. A
priori, plus de risque de présence de formaldéhyde dans les produits de beauté.
A priori seulement…..En effet, on le retrouve quand même dans des substances
conservatrices libératrices de formaldéhyde comme l’Imidazolidinyl
Urea ou le diazolidinyl urea.
Le phénoxyéthanol
On
ne compte plus les produits contenant du phénoxyéthanol. Comme les parabens ou
le formaldéhyde, c’est pourtant un produit à fort potentiel allergisant. Entre
autre effets, citons : le risque de cancer, le fort potentiel irritant
pour la peau et les yeux, les effets sur le système endocrinien et rénal…Je ne
m’étends pas plus sur la question…
Le Germall + (Propylene Glycol (and) Diazolidinyl Urea (and)
Iodopropynyl Butylcarbamate)
Le
germall + est souvent utilisé par les tambouilleuses maison en lieu et place
des parabens. Pourtant, le germall+, s’il ne comporte pas de parabens, contient
des substances aussi douteuses. Par exemple, l'Iodopropyl butylcarbamate, qui libère de
l’iode lors de son utilisation et qui augmente le risque de troubles
thyroïdaires. Bryld et ses
collaborateurs (1997) ont montré qu’il possédait des effets irritants et
allergisants. La Norvège et l’Allemagne
ont même proposé de retirer ce produit de la liste des ingrédients autorisés
dans les cosmétiques. L’autre composant du Germall+, le diazolidinyl urea,
n’est pas mieux loti : c’est un libérateur de formaldéhyde.
Mais, alors,
quelles sont les alternatives à ces conservateurs possiblement toxiques et
cancérigènes ?
A
notre échelle, nos produits sont utilisés rapidement. Si en plus, on prend soin
de les conserver au réfrigérateur, on diminue les chances de contamination. Mais
si on veut vraiment y introduire des conservateurs antimicrobiens, on peut
quand même trouver des alternatives à ceux décrits ci-dessus.
Le sorbate de
potassium (Potassium sorbate)
Le
sorbate de potassium ou sel de potassium d'acide sorbique est d’origine
synthétique ou naturelle (la plupart du
temps extrait du fruit du frêne). C’est un conservateur efficace contre les
moisissures et les levures, mais pas sur les bactéries. Il est utilisé dans de
nombreux produits alimentaires et dans le vin. Il est considéré comme inoffensif pour le consommateur et je n’ai
trouvé aucune donnée scientifique sur son éventuelle toxicité. De plus, il est
autorisé dans les produits bio BDIH (nomenclature allemande). Il est donc
intéressant à notre niveau mais ne suffit pas pour empêcher la prolifération
des bactéries.
A
noter : il n’est efficace que dans un excipient dont le ph ne dépasse pas
6.5. Il faut donc mesurer le ph et l’ajuster pour utiliser ce produit (on fait
descendre le ph avec de l’acide lactique en général).
Phase :
soluble dans l’eau
Utilisation :
de 0.15 à 0.3%
Le Benzoate de
sodium (Sodium Benzoate)
C’est
le sel de sodium de l’acide benzoïque. Comme le sorbate de potassium, il est
également utilisé dans les cosmétiques soumis à la nomenclature Allemande BDIH.
La plupart des études de toxicité ont révélé que ce produit était à priori sûr
pour l’homme.
Les huiles
essentielles
Et
oui, certaines huiles essentielles possèdent des propriétés antibactériennes et
antifongiques remarquables, et….quoi de plus naturel qu’une huile
essentielle ? Attention toutefois, je rappelle que l’utilisation des
huiles essentielles est sujette à caution car elles sont très puissantes et ne
peuvent être utilisées qu’en ayant les connaissances adéquates sur leur mode
d’utilisation et d’application et leurs effets secondaires. Certaines peuvent
provoquer des allergies, veillez donc toujours à tester leur effet avant toute
utilisation.
Parmi
les familles biochimiques que constituent les huiles essentielles, ce sont les
alcools et les phénols qui possèdent les propriétés antifongiques et
antibactériennes les plus remarquées. Citons quelques unes de ces huiles
essentielles :
Le
Laurier noble (Laurus nobilis) : D’après D. Baudoux :
antibactérienne remarquable et antifongique puissante. Son efficacité a été
démontrée par Maccioni et col (2002), notamment en synergie avec l’Eucalyptus
globulus et la sauge officinale.
La
cannelle écorce (Cinnamomum cassia) : antibactérienne à large
spectre très puissante et fongicide. Malheureusement, elle est dermocaustique (ne jamais l’utiliser
à l’état pur) et nécessite d’extrême précaution quant à son utilisation.
Et
aussi l’Eucalyptus globulus (Eucalyptus globulus).
Source photo: http://www.astro.northwestern.edu/rasio/AstrobioJRS/